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Tempête Alex : un an après

Sur la Vésubie, en aval de Saint-Martin, comme ici près de Roquebillière, les dégâts enregistrés ont été considérables.

Crédit photo Jean-Baptiste Nurenberg
En octobre 2020, la tempête Alex marquait à tout jamais les habitants des vallées de la Tinée, de la Vésubie et de la Roya. Cet événement météorologique sans précédent fut si violent qu’il généra d’innombrables dégâts humains, matériels et écologiques. Un an plus tard, l’heure est venue de dresser un premier bilan.

Un an qu’Alex, terrible épisode méditerranéen avec des cumuls de pluie sans précédent, a bouleversé le quotidien de la fédération de pêche des Alpes-Maritimes qui depuis travaille d’arrache-pied au chevet de la Tinée, de la Vésubie et de la Roya.

Une vue aérienne de Saint-Martin-Vésubie. C’était avant le drame.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Des coulées de cailloux

Les fortes précipitations ont touché essentiellement l’est du département. Sur la haute Vésubie, il est tombé plus de 500 mm en quelques heures. En haute Roya, la station météo des Mesches a relevé 660 mm de précipitation, le double de l’ancien «record». Les cours d’eau sont montés, en quelques heures, à plus de 7 m au-dessus de leur cote habituelle. Ces crues ont été amplifiées par ce qu’on appelle des laves torrentielles. Ce phénomène géophysique est caractérisé par des précipitations extrêmement violentes et soudaines qui déstabilisent le substrat et provoquent une accumulation d’eau, de sédiments plus ou moins fins, de blocs rocheux, d’arbres, etc. créant des vagues destructrices que rien ne peut arrêter. Les coulées de laves torrentielles de 2020 ont en outre débuté très haut en altitude, au-delà de 2000 m. Aujourd’hui, ces vallées, autrefois si riches et poissonneuses, sont méconnaissables. Le linéaire des cours d’eau fondamentalement modifié est sans précédent de mémoire d’homme. « C’était comme une zone de guerre, se souviennent les responsables de la fédération. Des maisons à moitié arrachées, des routes, des ponts pulvérisés ou engloutis sous des tonnes de gravats, des dizaines de voitures complètement démembrées, ensevelies par la boue au milieu du lit de la rivière ! » Avant la tempête, ces cours d’eau disposaient d’un lit mineur de 10 à 15 m de large, accompagné d’une ripisylve luxuriante. En une nuit, ils sont devenus de vastes coulées de cailloux de plusieurs centaines de mètres de large.

Avant la catastrophe, la Roya était considérée comme l’une des plus poissonneuses et des plus belles rivières du sud-est de la France.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Etat des lieux

Des pans entiers de montagne ont été engloutis par les eaux. Au total, entre Tinée, Vésubie et Roya, 700 km de linéaires ont été sévèrement touchés sur l’ensemble des trois bassins-versants. Les premières cours d’eau disposaient d’un lit mineur de 10 à 15 m de large, accompagné d’une ripisylve luxuriante. En une nuit, ils sont devenus de vastes coulées de cailloux de plusieurs centaines de mètres de large. réfections de voies de circulation ont permis de dresser un premier état des lieux sur ces cours d’eau de première catégorie qui abritaient des populations de truites denses et fonctionnelles, certainement parmi les plus belles de France. Dès le début de l’hiver, la fédération a lancé un suivi de reproduction de la truite fario et a pris une première mesure avec l’interdiction de la pêche sur la Vésubie et la Roya. En revanche, malgré des quantités d’eau très importantes, l’impact sur les populations piscicoles de la Tinée était moins significatif, deux tiers du linéaire ayant été relativement épargnés.

Tous les acteurs locaux du monde de la pêche sont mobilisés pour que les rivières touchées retrouvent un jour leur belle richesse passée.
Crédit photo :

De bonnes surprises

Très vite, les techniciens de la fédération, en concertation avec les différents acteurs des milieux aquatiques, ont établi un protocole de suivi de recolonisation sur plusieurs années. Dès le début de cet été, une soixantaine de pêches électriques ont été réalisées sur l’intégralité du réseau d’affluents. Ont été relevés également habitats piscicoles, populations de macro-invertébrés, composition physico-chimique de l’eau, etc. « Nous avons obtenu une image précise de l’état initial post-crue de nos trois bassins. Au milieu de cette désolation, nous avons eu quelques bonnes surprises. Entre la Vésubie et la Tinée, certaines têtes de bassin-versant ont conservé en effet des populations piscicoles relativement indemnes, comme la Gordolasque, la Madone de Fenestre ou les premiers kilomètres du vallon de Mollières, souligne Jean-Luc Cerutti, le président de la fédération. Côté Roya, rive gauche, des affluents comme la Lévenza, la Bendola ou la Carleva, sont passés au travers de la catastrophe. Tous ces petits coins permettent de conserver un petit peu d’espoir pour nos vallées. » De nombreuses pêches de sauvetage, au niveau des travaux de reconstruction des axes routiers, ont complété les données sur les cours d’eau principaux. Elles seront indispensables au retour d’un fonctionnement naturel des cours d’eau et de leurs populations piscicoles. Sur les secteurs fonctionnels où il reste des poissons, et c’est le cas sur de nombreux affluents, tout pourrait être rentré dans l’ordre d’ici deux à trois saisons.

Les laves torrentielles, que rien ne pouvait arrêter, ont totalement dévasté le petit village de Saint-Martin-Vésubie.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

De nouveaux profils

En revanche, sur les milieux les plus impactés, la modification morphologique des cours d’eau est tellement profonde qu’il faudra certainement plusieurs décennies pour retrouver les pêches d’avant. Depuis la tempête, les rivières sont passées d’un profil type radier-mouille à un profil dit en tresse. La pêche et les populations de poissons ne seront plus jamais les mêmes… Mais les rivières en tresse étant des milieux extrêmement riches, tous les acteurs croisent bien entendu les doigts pour retrouver le plus rapidement possible de magnifiques populations de truites dans ces vallées. La reconstruction des milieux, lente et fastidieuse, a déjà commencé. Les premières études ont permis d’établir leur degré de fonctionnalité et le niveau de présence de la faune. Pour les milieux où il reste suffisamment de poissons pour espérer une recolonisation naturelle, les AAPPMA concernées sont incitées à mettre en place une gestion patrimoniale, afin de retrouver au plus vite des populations de poissons sauvages. Sur les cours d’eau fonctionnels, riches en macro-invertébrés mais dépourvus de poissons, il sera nécessaire de donner un coup de pouce par translocation de populations (de la Levenza à la Roya, par exemple) ou par alevinages.

Une chance pour elles, les populations de truites sauvages de la Tinée n’ont pas souffert autant que celles de la Roya et de la Vésubie.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Soutien aux AAPPMA

Sur les secteurs très abîmés, il faudra attendre leur restauration hydromorphologique. « Sur le plan halieutique, il est important de redonner vie à certaines AAPPMA qui ont perdu la totalité de leurs linéaires, souligne Jean-Luc Cerutti, en créant des parcours de 1 à 2 km, avec des populations artificielles, dans le but de dynamiser la pêche. Mais il faut attendre que les travaux soient terminés. » Malheureusement, la catastrophe a eu de fortes retombées sur la vente des cartes de pêche dans le département cette année, la Roya et la Vésubie étant, depuis toujours, parmi les rivières les plus prisées des pêcheurs locaux.

Descendant du massif du Mercantour, la Tinée retrouvera-t-elle son profil d’avant la crue ?
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Garder l'espoir

Avec la perte du centre piscicole, mais aussi du parcours touristique du Boréon qui fait figure de haut-lieu de la pêche dans cette région, beaucoup de pêcheurs ont encore du mal à croire qu’il reste du poisson, et même beaucoup de poissons, dans les autres cours d’eau du département. Cependant, cette catastrophe écologique sans précédent dans les Alpes-Maritimes ne doit pas occulter la qualité et la richesse de toute la partie du réseau qui n’a pas subi la tempête. Le Var, L’Estéron, le Cians, la Siagne, le Loup, la Cagne et tous les magnifiques lacs du Mercantour sont autant de lieux paradisiaques qui regorgent toujours de truites fario sauvages qu’il faut absolument découvrir… si ce n’est déjà fait !

 

En Italie aussi

Arrivée par l’ouest, la tempête Alex ne s’est bien sûr ni arrêtée ni même atténuée à la frontière française, mais a poursuivi son chemin vers l’Italie, durement touchée elle aussi par ces pluies diluviennes. Les bassins piémontais limitrophes de la France ont été dévastés de la même façon par des laves torrentielles à l’image du Gesso, du Tanaro ou, un peu plus au nord, du Sesia.

 

 

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Biologie - Environnement

Magazine n°918 - novembre 2021

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