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Le montage en poils creux

Crédit photo Jean-Baptiste Nurenberg
Permettant d’obtenir des imitations de toute beauté, les délicats montages en poils creux exigent patience et méticulosité. Un savoir-faire délicat qu’il faut à tout prix apprivoiser.

Monter des mouches avec du poil creux de cervidés est une activité aussi noble qu’exigeante, venue des États-Unis il y a déjà bien des décennies, à l’époque où les composants des mouches à carnassiers étaient façonnés essentiellement dans des matériaux naturels.

Une simple lame de rasoir est l’outil parfait pour les coupes franches et la création de volumes cylindriques réguliers. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Pointu !

Le deer hair tying (littéralement montage à base de poils de cerf) pousse en effet le monteur à élever son niveau de quelques crans. Cette pratique, sur des bases simples, peut devenir un véritable art ! Certains grands pêcheurs, monteurs ou journalistes, tel Dave Whitlock ou Tim England ont hissé le travail du poil creux au statut de technique à part entière, créant des modèles de renommée internationale.

Plus les poils sont fixés de manière très dense et très serrée, et meilleure sera au final la flottaison de l’ensemble.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Sans limite

À cette époque, ces matériaux étaient, grâce à leurs caractéristiques de flottabilité, des produits phares dans la réalisation des mouches de surface. Elles étaient, et sont toujours, très souvent destinées à la pêche du black-bass. Mais en fait, cette technique, lorsqu’elle est bien maîtrisée, n’a plus aucune limite si ce n’est l’imagination du monteur. Grenouilles sous toutes leurs formes, souris, serpents, écrevisses mais aussi poppers, crawlers… les perspectives sont infinies ! Les assemblages de couleurs et le potentiel de modelage que procurent ce matériaux permettent ainsi de répondre à presque tous les besoins. Techniquement, un montage classique à base de poil creux n’est pas forcément compliqué mais nécessite une extrême rigueur dans le travail. La qualité finale repose sur la récurrence de chaque étape et le tassage du poil qui garantit la meilleure densité à la mouche. Cette technique se décompose en deux grandes séquences essentielles: le montage d’abord puis la sculpture.

L’égaliseur de poils fait partie des outils indispensables ici. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Le montage

Il est préférable de ne pas travailler sur une hampe d’hameçon nue, mais de la couvrir intégralement d’une épaisseur de fil de montage. De cette manière, le poil glisse moins et les couleurs restent bien positionnées. Au final, la mouche va gagner en solidité. C’est le moment d’en profiter pour fixer un anti-herbe en nylon. Le fil utilisé est d’une importance capitale puisqu’il doit permettre de serrer, fixer et répartir les poils creux de façon uniforme, sans les couper. Les monteurs Old School utilisent souvent comme fil de montage le Flat Waxed Nylon (Danville). Le montage part toujours de l’arrière pour revenir petit à petit vers l’avant.

Un peu de pratique est nécessaire pour utiliser les poils creux de manière à créer de superbes réalisations comme ce crawler.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

La conception du corps est souvent assez fastidieuse. Deux gestes sont alors à maîtriser : le spinning qui consiste à disposer de manière parfaitement uniforme des poils sur tout le pourtour de la hampe, un peu à la manière d’une collerette, et le stacking qui permet des fixations bien plus ciblées. Cette dernière technique est par exemple utilisée pour fixer solidement et précisément les touffes multicolores. Cet exercice est aussi délicat qu’il est long, et un bon monteur de poil creux doit savoir être patient. Entre stacking et spinning, les gestes se répètent, quel que soit le modèle choisi. Chaque étape se finalise par plusieurs tours morts. Après le tassage, une petite goutte de vernis souple vient sécuriser le tout.

Un peu de pratique est nécessaire pour utiliser les poils creux de manière à créer de superbes réalisations comme ce crawler. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

La sculpture

Une fois la hampe intégralement et densément recouverte de poils, place à la taille. L’erreur est ici interdite ! La mouche doit en premier lieu être dégrossie en surface aux ciseaux. Puis c’est à la lame de rasoir (neuve…) que l’on se lance dans la modélisation de la création. On pourrait comparer cette étape à de la sculpture. La souplesse de la lame permet de jouer avec les courbes afin de créer des coupes droites et surtout arrondies. Dans un souci d’équilibre, la symétrie doit être parfaite… Pour gagner un peu plus en précision, il est préférable de couper la lame en deux, comme lorsque l’on arrive au niveau de la tête. Deux yeux viendront définitivement finaliser le chef-d’œuvre !

Il existe une petite astuce très simple qui permet de finaliser au mieux une imitation en poil creux. Ainsi, à la fin du dégrossissage, en passant son ébauche à la vapeur, la mouche, encore inachevée, va rapidement gonfler et laisser apparaître tous les défauts, d’ordinaire invisibles. Il ne reste plus qu’à ajuster le montage.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

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Magazine n°923 - Avril 2022

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