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Les leurres vibrations en mer

L’un des énormes intérêts des leurres vibrations, c’est leur extrême polyvalence qui permet de toucher des espèces très diverses. Témoin cette jolie dorade grise, prise au X Dyna Silent (Megabass) dans moins de 3 m d’eau. 

Crédit photo Franck Ripault
Mal connus et souvent négligés au profit de poisson-nageurs plus conventionnels, les vibrations ont pourtant de sérieux atouts à faire valoir en mer. Très polyvalents, ils offrent en effet l’avantage de se prêter à bien des animations et d’intéresser un grand nombre d’espèces.

Les lipless n’ont pas trop la cote en mer. Pourquoi cette réticence ? Leur forme trapue, très éloignée des silhouettes des proies ordinaires du bar (lançon, anguille, petite orphie, sprat, sardine, etc.) ? Des distances de lancer inférieures à celles obtenues avec un jerkbait ou un stickbait ? Pourtant, quand on les connaît bien, ils sont parmi les leurres les plus efficaces, et ce quelles que soient les conditions rencontrées.

Certains modèles, comme ce Twin Vibe (River2Sea) sont pourvus de plusieurs points d’attache ce qui permet de modifier leur angle d’inclinaison sous la traction et, de ce fait, de varier les animations. 
Crédit photo : Franck Ripault

Deux grands types

Des deux familles existantes – lipless crankbait et lame vibrante –, c’est bien la première qui nous intéresse ici. Ce leurre est reconnaissable au méplat qu’il présente sur la tête. La pression de l’eau qui s’y exerce (un peu comme sur une bavette) entraîne un effet rolling très serré, des vibrations proches du frétillement d’une proie paniquée. Incliné à plus ou moins 45°, selon le positionnement du point d’attache, le leurre est réactif dès la première traction imprimée. Il travaille dans toute la colonne d’eau puisqu’il est coulant. Il accepte un large éventail d’animations, du linéaire à la verticale en dents de scie. Une animation proche du mort-manié, canne haute, est même ma préférée sur des fonds peu soumis aux courants. On l’aura compris, c’est un leurre très polyvalent. Il peut s’adapter à tous les environnements : plateaux rocheux, fonds sableux, estuaires, baies abritées… Personnellement, je ne peux plus m’en passer, surtout si je ne repère pas d’activité particulière en surface. C’est un leurre de prospection qui ratisse vite et large. Du bord, il est surtout pratique depuis un léger surplomb, au pied d’une falaise ou en bordure d’un quai, par exemple.

Cette côte agitée, encombrée de blocs rocheux, est un terrain idéal pour pêcher au lipless crankbait. Des leurres bien utiles !
Crédit photo : Franck Ripault

Les animations

Je commence par une prospection rapide sous la surface avant de prospecter plus creux. En alternant tractions sèches et relâchés aléatoires, le lipless évolue en dents de scie, plus ou moins rapidement selon sa densité. Animation qui peut amener un bar à réagir violemment au passage. Près de gros enrochements, assises d’une jetée ou d’une digue, c’est souvent payant. À l’occasion, on peut s’aventurer dans une série de bottom tapping, canne haute, capable d’affoler les poissons embusqués dans les anfractuosités. À l’aplomb des structures artificielles (piliers de pontons ou de tabliers de quai), une pêche verticale (remontée rapide, descente lente) peut se montrer efficace. En wading, sur de faibles fonds où alternent sable, herbiers à zostères ou massifs d’algues à flotteurs, le leurre doit être récupéré rapidement pour ne pas accrocher.

Le profil d’une côte rocheuse se doit d’être bien étudié avant de lancer son leurre surtout si on choisit un lipless coulant, connu pour flirter avec le substrat. 
Crédit photo : Franck Ripault

Attention accrocs !

Certains modèles sont pourvus de plusieurs points d’attache afin de varier l’inclinaison. Sur des zones sableuses, il m’est arrivé de poser le leurre sur le fond avant de l’arracher brusquement : le nuage ainsi soulevé imite une proie en fuite. Avec cette technique, quelques rougets grondins s’y sont laissés prendre, la nuit, alors que je recherchais les bars attablés sur des tacauds juvéniles. En estuaire, un vibration est moins efficace qu’en mer ouverte mais on peut l’essayer en se méfiant bien des tables ostréicoles qui ne laissent aucune chance sur un accrochage. Sur des parties plus dégagées, zones de sable ou de cailloux, le leurre peut aussi intéresser quelques poissons venus chercher de petits labres. Les dorades grises sont aussi susceptibles d’attaquer ce leurre et les prises peuvent très vite s’enchaîner. Par ailleurs, dans les secteurs plus tourmentés où le ressac malmène couvert végétal et petite faune locale, le lipless est le leurre à sortir en priorité. L’agressivité de sa nage et les flashes qu’il renvoie lui permettent d’être détecté rapidement malgré les bruits parasites générés par les vagues. Curieusement, si les bars sont absents, les labres prendront le relais avec des attaques très brutales. Je prends alors soin de remplacer l’armement d’origine par un modèle de taille inférieure, une habitude que j’adopte toujours en présence de poissons à petite gueule.

Des prises plutôt rarissimes que ces trois poissons pélagiques : maquereau, maquereau espagnol et chinchard à queue jaune, pris avec le même lipless cranckbait
Crédit photo : Franck Ripault

Les pélagiques d'abord

En bateau, le lipless donne accès à un terrain de jeu immense. Abords des têtes de roche, hauts-fonds, zones à laminaires sont autant de spots à prospecter méthodiquement. Choisissez les modèles les plus lourds (plus de 20 g) à animer en diagonale ou en verticale. Généralement ce sont les pélagiques qui, les premiers, se manifestent : maquereaux, chinchards à queue jaune, grandes orphies et même bonites. Ces petits prédateurs très vifs, que ses importantes vibrations semblent exciter, peuvent frapper ce leurre sans relâche. Flashes lumineux intenses, claquement des billes bruiteuses, cliquetis métallique de l’armement participent à cette débauche de signaux qui entraîne les poissons dans une compétition frénétique. Dans la plupart des cas, les touches arrivent en rafale, comme les ferrages dans le vide ! Sur une chasse repérée en surface, le lipless offre l’énorme avantage de pêcher immédiatement dans les couches inférieures de la colonne d’eau où se tiennent les plus gros prédateurs. Le lipless peut donc avantageusement remplacer le jig pour une prospection plus lente à bonne profondeur. Je l’ai encore constaté récemment à proximité immédiate des falaises d’Ouessant. Ce jour-là, maquereaux et petits lieus noirs s’en donnaient vraiment à cœur joie sur de toutes petites sardines bousculées par la marée. Il semblait évident que les bars pouvaient être présents sur la zone mais plus en profondeur, ce que confirma dans un premier temps le sondeur.

Si le bar reste la cible privilégiée des pêcheurs aux leurres en mer, c’est loin d’être la seule surtout avec ces diables de vibrations. 
Crédit photo : Franck Ripault

Grosse touche

Mon lipless le plus lourd a vite avalé les 20 m qui le séparaient de la surface pour entamer sa partition endiablée, à base de tractions vives de faibles amplitudes, de mouvements de dandine, pour finir par être avalé au terme d’une touche inouïe. En définitive, gros lieus jaunes et bars, dont les embonpoints témoignaient de la curée qui se déroulait sous l’embarcation, avaient fini par s’intéresser à ce leurre dont l’allure était pourtant bien éloignée de celle de leurs malheureuses proies du moment.

Ce beau lieu jaune a succombé aux charmes du Rippin’Rap (Rapala). 
Crédit photo : Franck Ripault

Le plus polyvalent

On peut être tenté par les leurres de surface, plus démonstratifs que ces modèles coulants mais, en raison notamment de l’accoutumance observée sur certaines zones très pêchées aux stickbaits, le lipless offre une sacrée alternative pour couvrir un maximum de terrain, déclencher des attaques réflexes, débusquer des poissons jusque dans des spots réputés improbables. À mes yeux, le vibration est le leurre le plus polyvalent qui soit, capable de surcroît d’intéresser quasiment tous les prédateurs. N’en jetez plus !

Colonne de gauche, de haut en bas : Twin Vibe (River2Sea), LV-300N (Lucky Craft), Flatt Shad (Sébile), TN 60 (Illex). Colonne de droite, de haut en bas : Rippin’ Rap (Rapala), Arashi Vibe (Storm), 3DB Vibe (Yo-Zuri), Vibration X BAF (Megabass).
Crédit photo : Franck Ripault

Comment choisir ?

  • Le poids : les gammes de lipless se démarquent par un choix limité en termes de poids et rares sont les modèles de plus de 20 g. Au-delà de 15 m, il paraît difficile de pêcher suffisamment creux. Certains préfèrent utiliser les lames (blades), plus proches du jig que du poisson-nageur.
  • Les coloris : j’avoue un faible pour les couleurs assez neutres, adaptées au spot. Une tonalité brun-orange me semble idéale en présence d’algues car c’est la parfaite imitation d’un petit poisson de roche qu’aiment les gros bars sédentaires. Des couleurs plus clinquantes sont davantage adaptées en pleine eau, en présence de carnassiers bien regroupés en banc.
  • L’effet bruiteur : conseillé en milieu agité : ressac ou tête de roche, par exemple. Les modèles silencieux l’étant dans les secteurs plus calmes, plus feutrés, là où les poissons peuvent être difficiles.

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Magazine n°910 - mars 2021

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