Avec Bruno Pebe : comment pêcher le pagre au leurre souple ?

Depuis quelques années, ce poisson est régulièrement pêché sur la côte bretonne mais il n’est pas encore présent sur tous les secteurs. Il est le plus souvent pêché aux appâts, ou avec des techniques mixant appâts et leurres comme le tenya ou le madaï jig. Mais notre ami veut une pêche sans appât naturel. « On peut prendre de jolis pagres aux leurres souples, la première étape est de bien choisir son poste de pêche! »

Les secteurs avec de forts courants

En effet les pagres ne se trouvent pas partout. Le pagre est un poisson chasseur et il aime les secteurs avec de forts courants. La nature du fond est déterminante : ces poissons sont en général sur des fonds riches en coquillages concassés, en merle ou en gros gravier. L’idéal est un fond de ce type, subissant des courants puissants et ayant à proximité des zones d’affût comme un tombant ou des gros blocs de roche. En toute logique, toutes les zones riches en nourriture et en petits poissons sont intéressantes et peuvent attirer de gros pagres. La pêche du pagre commence souvent par une minutieuse recherche sur des cartes de sédimentation. Il existe plusieurs sites Internet accessibles à tous offrant des cartes Shom. Évidemment, le pagre n’est pas le seul poisson à fréquenter ces postes. On trouvera généralement des dorades grises, des coquettes (un poisson de la famille des labres aux magnifiques couleurs) des rougets grondins… Si une étude minutieuse des cartes permet de trouver des postes à pagres, la capture d’autres espèces comme des dorades grises, des coquettes, des rougets ou d’autres sparidés peut servir de piste de recherche. Lorsque l’on capture l’un d’entre eux, le pêcheur pourra alors insister sur le poste car plusieurs passages du leurre sont parfois nécessaires pour décider un pagre. Il ne faut pas hésiter à revenir à un autre moment de la marée, en particulier à un moment où le courant sera plus fort. Si, après une touche loupée, on remonte un leurre souple sectionné, il y a de fortes chances que ce soit l’attaque d’un pagre. La bouche de ce poisson est armée de dents tranchantes qui découpent les leurres comme un scalpel.

Canne courte et légère

Comme toujours, avec la team Bruno et son compère Romain, le départ se fait bien avant le lever du jour. Nous sommes sur poste avec les premiers rayons du soleil et le paysage est à couper le souffle. Chanceux celui qui n’a jamais pêché aux Glénans ! Il lui reste un lieu magique à découvrir, un lieu où venir traquer bars et autres poissons marins, dans une ambiance de rêve. Mais encore plus chanceux celui qui voit le jour se lever et laisse descendre son leurre dans les eaux prometteuses de l’archipel ! Et si notre vue ne nous permet pas de voir sous la surface de la mer, un rapide coup d’œil à l’écran du sondeur nous révèle la nature du poste : roches, hauts-fonds, plateaux, cassures… Tous les éléments sont bien réunis pour concentrer une belle population de pagres. Bruno nous informe que la semaine passée il a fait plusieurs jolis poissons sur ce poste tapissé de gravier. Il faut dire que, pour eux, c’est un vrai paradis, cet endroit leur offre le gîte et le couvert. Bruno nous tend une canne déjà montée, elle est courte et légère, un matériel qui pourrait surprendre de nombreux pêcheurs en mer ! Mais comme toujours sur ce bateau, la recherche des sensations est essentielle. Pour cette pêche, notre ami utilise une canne courte d’une longueur comprise entre 1,80 à 2,10 m et d’une puissance de 10/20 g. Cette canne possède une action rapide pour pouvoir manier sèchement les leurres. Il faut aussi qu’elle soit très sensible, pour toujours garder le contact avec des leurres de quelques grammes. Il lui associe un moulinet en taille 2500 à 3000 garnis de tresse de 14 ou 16 livres permettant de bonnes distances de lancer avec des leurres souples de taille moyenne et peu lestés. Le bas de ligne, d’une longueur minimale de deux mètres, sera constitué d’un fluorocarbone de 20 à 25/100. 

Slugs ou shads

Les leurres souples pour la pêche du pagre en verticale sont des slugs ou des shads montés sur des têtes plombées à la forme profilée pour l’animation en mode vertical. Certains pêcheurs ajoutent un triple « voleur » fixé sur la queue du souple et raccordé à la tête plombée par un brin de tresse, montage bien connu des pêcheurs de sandre. Le pagre n’est pas doté d’une bouche très large comme le bar et il lui arrive de saisir le leurre par la queue. L’hameçon voleur évite alors la touche loupée suivie d’une remontée de leurre sectionné. Le poids des têtes plombées dépend de la profondeur et du courant. Concernant les couleurs, les modèles clairs de teinte naturelle semblent avoir la faveur des pagres. Bruno a déjà placé le bateau avec précision et nous commençons notre dérive. Nous sommes tous les trois synchronisés et lançons au même moment. Nos trois leurres touchent l’eau : c’est parti ! Il faut bien se concentrer pour visualiser mentalement le déplacement du leurre dans l’eau. Après quelques secondes de descente, il touche le fond. Le « toc » dans la canne nous indique l’impact sur le substrat dur.

Première touche

L’animation est classique, c’est une animation en vertical. Il faut décoller le leurre du fond par une grande traction de bas en haut et accompagner la ligne lors de la descente du leurre. Il est important d’être très attentif lors de la phase de descente, en effet, c’est souvent au cours de celle-ci que la touche se produit. Parfois les pagres évoluent au-dessus du fond et viennent saisir un leurre qui s’agite plusieurs mètres au-dessus. Dans ce cas il est nécessaire de pêcher en pleine eau en faisant remonter le leurre, avec quelques tours de manivelle, plus ou moins rapidement, dans la colonne d’eau. Cette technique peut se pratiquer avec différents leurres, qu’ils soient souples comme des slugs ou des shads mais aussi des jigs. Les petits jigs sont d’excellents leurres à pagre, notamment par l’avantage de ne pas craindre les dents acérées de la bête ! La première touche ne se fait pas attendre ! Le leurre de Romain se fait attaquer dès la première descente. Comme d’habitude avec les pagres, le combat est puissant et les longs rushs donnent le sourire… Romain est un pêcheur expérimenté et bientôt le poisson est remonté à bord. Notre chanceux pêcheur se saisit délicatement de sa prise et veille à ne pas mettre ses doigts à proximité de la bouche du pagre, armée de dents acérées. Le pagre repose sur le fond du bateau et nous pouvons maintenant l’observer en détail. C’est confirmé, la dentition du pagre n’a rien à envier à celle de la dorade royale. Le plus impressionnant est sa couleur… Et que dire de la robe rouge avec de magnifiques reflets bleu argenté de ce superbe poisson ? Un poisson exotique dans un décor digne des Caraïbes, décidément la Bretagne nous réserve bien des surprises !