Fiiish est devenu iconique pour la pêche du bar, d’abord en Bretagne, puis dans la France entière, et maintenant dans une grande partie de l’Europe. Logiquement, les amoureux de la marque ont demandé de développer un leurre de surface. Le projet a vu le jour en 2017 dans les labos de la société française installée à Guipavas aux abords de Brest. J’ai eu la chance de rencontrer la solide équipe de recherche et développement. Solide par ses compétences, mais aussi par le nombre de ses membres.
Objectif environnement
Le cahier des charges était assez usuel au départ : proposer un leurre facile à lancer et à animer. L’ébauche du Biotop Stick a été rapidement définie. Mais c’était trop simple pour Fiiish ! En 2018, nouvelle ambition pour l’équipe qui souhaite diminuer l’impact environnemental de ce leurre au maximum et pourquoi pas, le rendre biodégradable dans le milieu marin. Cela sous-entend des avancées technologiques insoupçonnées au début du projet… « Il fallait en premier lieu trouver la matière répondant à ces attentes et réussir à la mettre en forme, précise Louis Leveuf. Avec l’aide de partenaires académiques et industriels, les tout premiers leurres durs biodégradables au monde sont sortis de la presse d’injection fin 2018 et ont été testés début 2019. Je ne vous raconte même pas l’excitation lors de la prise des premiers poissons ! »
Une série d'écueils imprévus
Malheureusement, les premiers points bloquants arrivent très vite… Fabriquer quelques leurres fonctionnels à l’échelle du laboratoire a été possible mais, dès la phase industrielle, la matière devenait cassante. Les ingénieurs ne savaient pas comment assembler les coques sans colle ou autres produits chimiques polluants en assurant une qualité irréprochable. Idem pour les yeux en plastique collés, ce qui ne répondait pas aux ambitions. Et enfin comment colorer le leurre sans peinture, car toutes représentent un revêtement polluant ? L’année 2020 a été consacrée à résoudre ces points techniques, sans grand succès. Il fallait investir plus de temps, plus d’argent. L’équipe refuse de laisser tomber ce projet si proche du but. L’entreprise recherche des aides avec une ambition supplémentaire : la production doit être faite en France. Un peu de chauvinisme ne nuit pas! La nouvelle phase débute en mai 2021 avec le soutien de BPI France et de la Région Bretagne sous l’acronyme LeurreBio. L’aide financière de 40% de l’enveloppe globale, estimée à 100 000 euros, permet de résoudre l’ensemble des écueils. En novembre 2022, une présérie de 400 pièces confirme les faisabilités technique et industrielle de ce nouveau leurre. Louis et son équipe poussent enfin un gros ouf de soulagement !
Biodégradable, comment ?
Lorsque nous nous sommes vus dans leurs locaux j’ai bien sûr demandé pourquoi ils ont souhaité se tourner vers des produits écologiquement responsables et biodégradables. La réponse de Louis a fusé : « Tout simplement parce que nous sommes des pêcheurs tout autant passionnés par ce loisir que par l’environnement où nous le pratiquons. Il arrive malheureusement de perdre des leurres faits de plastique dans le milieu naturel, sans qu’il soit possible de les récupérer. Ainsi, il semble naturel d’œuvrer pour les rendre biodégradables dans le milieu où ils risquent de finir leur vie. » La biodégradation est sûrement le critère le plus populaire. C’est un mécanisme assez simple à comprendre. Il y a une phase de dégradation, commune à tous les plastiques, qui va être soit mécanique avec l’érosion du leurre qui frotte sur le sable, soit chimique comme les chaises de jardin qui deviennent cassantes avec le temps. C’est cette phase qui forme les fameux microplastiques. Les plastiques et microplastiques biodégradables vont être bio-assimilés (comprendre être mangés puis digérés) par des bactéries naturellement présentes dans certains milieux. À terme, il n’y aura ainsi aucune pollution plastique résiduelle. Il est important de comprendre que les bactéries ne sont pas les mêmes dans tous les milieux. Ne demandez pas à Louis en combien de temps son leurre disparaît… « Plus les bactéries seront présentes en nombre, plus le produit sera dégradé en microplastiques, plus la biodégradation complète sera rapide, explique le directeur technique. Les bactéries seront plus nombreuses dans les eaux chaudes que dans les eaux froides. Donner une durée serait absurde, l’important est qu’il n’y aura à terme aucune pollution plastique résiduelle. »
Non aux toxiques !
Second critère essentiel pour caractériser l’impact écologique d’un produit : son écotoxicité. Bien qu’un plastique puisse être biodégradable, il pourrait être écotoxique et entraîner des atteintes à la santé. Certains additifs utilisés ou certaines transformations peuvent rendre écotoxique une matière qui ne l’était pas. Enfin, le troisième critère permettant de réduire l’impact environnemental d’un produit plastique est son aptitude à être fabriqué sans ressource pétrochimique mais à partir de ressources renouvelables. C’est du plastique biosourcé. Dans ce projet, Fiiish a sélectionné une matière qui respectait ces attentes.
Tu as de beaux yeux...
Ce type de matière sélectionnée pose de nombreuses contraintes techniques. Elle subit mal les transformations, c’est-à-dire être chauffée puis mise en pression pour prendre la forme d’un leurre. Gestion de la température, présence d’humidité lors du procédé d’injection, assemblage du leurre par soudure ultrason tout doit être ultra-rigoureux, sinon le leurre sera cassant. « Pour ne pas utiliser de peinture et proposer plusieurs couleurs, nous avons exploré plusieurs pistes, reprend Louis. Certaines sont encore à l’étude, mais pour le premier lancement, vous trouverez des leurres colorés dans la masse, en très faible pourcentage, avec des matières organiques ou minérales qui ne possèdent pas d’écotoxicité connue dans le milieu marin. Là aussi, la principale difficulté consistait à ne pas dégrader la matière ! Vous découvrirez un blanc translucide, un noir métallisé et le white pepper, l’édition limitée de lancement ! » La question des yeux a sûrement été l’une des problématiques la plus longue à résoudre. Exit les yeux collés ou peints ! L’équipe a développé un concept d’œil en bille de verre. En plus du côté réaliste et non polluant, cette innovation booste les performances du leurre ! Cela permet de mieux répartir les masses pour un même équilibrage, ce qui augmente l’inertie du leurre. Il est moins sensible au vent pendant les lancers et va plus loin. Il est aussi plus facile à animer en « walking the dog », car l’énergie de l’animation n’est pas perturbée et dissipée par les éléments extérieurs (vent, clapots, etc.) Ce concept fait l’objet d’un brevet. Bien que cette solution paraisse simple une fois le leurre fini, les difficultés techniques sont réelles. Il a fallu anticiper les déformations du plastique lors de l’injection pour que les billes rentrent sans forcer et réussir à souder les coques sans faire vibrer les billes de verre. Inédit… Maintenant que la technologie est maîtrisée, elle peut être déclinée sur d’autres leurres : jerk minnow, jerkbait, crank. L’équipe R&D réfléchit aux améliorations et ajouts techniques à apporter. Ce n’est que le début d’une nouvelle ère de produits chez Fiiish !
Hameçons VMC bien sûr !
« VMC est plus qu’un fournisseur pour nous, reconnaît Louis, c’est un véritable partenaire. Grâce à eux, nos développements d’hameçons les plus exigeants voient le jour. Pour ce projet, où les exigences environnementales étaient sévères, ils ont développé spécialement leur incontournable 7237 en acier inoxydable et donc sans revêtement chimique. » Cerise sur le gâteau, Fiiish a relevé le challenge de développer un pack 100% carton écoresponsable, fait en une seule pièce pour en faciliter le recyclage. Sans colle, ni agrafe, ni plastique, et imprimé en France avec des encres végétales.