C’est près de Maruéjols-lès-Gardon (30) que j’ai décidé de m’installer aujourd’hui, sur le Gardon. Mon poste est situé entre deux digues qui bloquent les poissons. Je sais qu’à cette saison, la chaleur va vite devenir étouffante et qu’entre 12 et 15h les poissons, carpes, carassins, quelques gardons et truites d’alevinages, cesseront toute activité. Je ne perds donc pas de temps et monte une seule canne, rectifiant une dernière fois le mouillage de mon amorce.
Visant les gros poissons, je l’ai prévue plus collante qu’une amorce classique pour travailler moins dans la couche d’eau (voir encadré). Pour ces raisons, je la mouille en deux voire trois fois. J’ai entendu dire que le fond ici était jonché d’accrocs amenés par les crues. Quelques lancers avec un feeder métallique confirment : ça accroche ! Malgré tout, en cherchant de plus en plus loin, à environ 45-50m, je finis par trouver un fond de gros graviers et de galets de rivières, la profondeur diminuant avec la distance. Je choisis de pêcher au plus près de cette zone dangereuse car j’y ai aperçu des poissons de belle taille qu’il serait dommage de négliger en pêchant trop loin.
L’amorce de Jérémie
- Un kilo de Romain Foiratier Feeder (Champion Feed)
- 500g de 50/50 Method Paste Green (Sonubaits)
- Une poignée de Light Carp Pellets (Sensas) blancs 4mm
Du solide
Ma canne, une heavy d’action progressive, mesure 3,70m et est équipée d’un scion en 2,5oz en carbone qui donne un peu de rigidité en pointe. Dans mon moulinet taille 5000, je dispose d’un nylon en 28/100. Un ensemble «viril» donc car je prévois d’avoir à tirer fort à chaque touche pour espérer faire passer les poissons au-dessus des accrocs redoutés. J’utilise un montage à plat de taille moyenne (stop-float medium, émerillon n°30) installé directement sur le corps de ligne pour éviter tout nœud de raccord. Pas de feeder qui pendouille donc, risquant d’accrocher à chaque récupération. La cage est un feeder rocket en plastique, combinaison de forme et de matière qui permet des lancers précis à moyenne et longue distance mais aussi de décoller rapidement du fond dès les premiers tours de manivelle. Grosse contenance et lest de 30 g, c’est le bon compromis pour déposer mon mélange sur le coup peu souvent mais en bonne quantité.
Fonds de tiroir
En été, je participe à un peu moins de compétitions et je ne dispose pas d’un gros stock d’appâts vivants dans mon frigo. J’ai fouillé dans mon congélateur pour retrouver un bon litre d’asticots rouges et blancs qui vont me servir aussi bien dans l’amorce que sur l’hameçon. J’ai aussi quelques gozzers rouges, vivants eux, et du maïs. Il est déjà 9h. Le soleil monte vite et je décide de pêcher directement, sans même amorcer. C’est une stratégie que j’utilise de plus en plus lorsque l’activité des poissons est visible. Ils sont là, un gros amorçage d’appel serait inutile. J’adopte d’entrée une cadence soutenue, pas plus de trois minutes entre chaque dépôt. J’enregistre rapidement des signes d’activité, des passages dans le fil puis je vois mon scion plier doucement vers l’aval.
Premier carassin
Je tente une tirette et un poisson semble bien être au bout. Je ferre et, en effet, un premier poisson, un carassin rejoint ma bourriche. C’est curieux car, d’habitude, les carassins provoquent des touches violentes lorsqu’ils sont en pleine activité. J’ai donc un problème de lecture de touche ! J’interviens alors sur mon bas de ligne. De 50cm en 14/100, avec un hameçon rond et moyen de fer n°16, je passe à 30cm de 16/100 avec un n°12. Il est important d’augmenter le diamètre d’un bas de ligne qu’on raccourcit car les touches deviennent beaucoup plus brutales et, sur un coup de fusil, il serait dommage de perdre un beau spécimen. Je relance rapidement mon montage amélioré et le constat est sans appel : d’entrée, une touche m’arrache presque la canne des mains. Encore un carassin qui, à ma plus grande surprise, est rouge tacheté de noir. À partir de là, la pêche devient magique. Un poisson rouge de plus du kilo sur un parcours naturel, c’est une chance ! La mise à l’épuisette est un moment d’émotion palpable. J’esche toujours avec un gros bouquet d’asticots morts. Ça marche, ce serait bête de changer. Ma cage touche à peine le fond que je suis déjà pendu ! Trois poissons d’affilée en dix minutes… une vraie pêche de magazine ! Montage et eschage étant parfaitement au point, j’essaie maintenant de gagner en efficacité en rechargeant le plus vite possible, en gozzers morts, sans maïs.
De toutes les couleurs
Les carassins rejoignent maintenant la bourriche les uns derrière les autres. La plupart sont rouges, orangés, noirs et rouges, je savoure comme il se doit ce merveilleux moment de pêche. Quelques badauds intrigués, qui se sont arrêtés derrière moi, n’en reviennent pas ! Le temps passe, je maintiens ce rythme infernal et je crains que ma bourriche devienne trop lourde. J’en sors une seconde, de 4m, pour le confort des poissons mais aussi avec l’idée d’immortaliser cette journée par une belle photo. C’est alors que les touches semblent ralentir, quoique je remarque toujours de longs passages dans le fil. Il me semble deviner le scénario : les carpes seraient-elles arrivées ? Je pose ma canne sur son support et patiente un peu plus avant de relancer. J’espace mes lancers de dix minutes maintenant. C’est alors que le scion se détend puis repart violemment vers l’avant. Le support, heureusement, fait son travail et sauve mon matériel d’une noyade assurée ! Le ferrage est inutile, le contact immédiat. Et c’est en effet une carpe qui me sort du fil rapidement avant de faire demi-tour pour finir enfin, après un rude combat, dans le filet de l’épuisette. Ces poissons de rivière sont vraiment exceptionnels, ils ont de l’énergie à revendre. Voilà maintenant quatre heures que je pêche et les choses ont changé. Les touches s’espacent, les carpes jouent les trouble-fête, les carassins semblant être descendus. Quelques lancers sur la droite avec une cage vide me permettent de reprendre quelques poissons.
Record battu !
Six heures que je suis en action. Il fait vraiment très chaud et, après avoir repoussé plusieurs fois l’instant du dernier poisson, je crois qu’il est temps d’en rester là. Mes deux bourriches sont chargées et je décide de gonfler une piscine étudiée pour les pêcheurs de carpe afin d’y installer les poissons en toute sécurité le temps d’une photo. J’ai pesé : il y en a soixante-dix kilos, poids qui résonnera dans ma tête jusqu’à mon retour à la maison et qui, jusqu’à ce jour, reste mon record. Je suis retourné pêcher depuis ce même spot sans jamais égaler ce résultat. Cette sortie-là tenait sans doute du miracle !
Son matériel
- Canne : Horizon Pro Distance (Matrix) 3,70m - 90g
- Moulinet : Horizon 5000 (Matrix)
- Nylon : Special Feeder (Rive) 28/100
- Bas de ligne : Power Micron (Matrix) 16/100
- Hameçon : MXB3 (Matrix) n°12