En général, le mois de mars annonce les premiers jours du printemps… et nos premières envies irrésistibles d’aller flâner au bord des rivières, canne en main pour déclencher quelques silures. Dans ces conditions, je pratique la pêche aux vers et aux worms – je regroupe sous ce terme de worm tous les leurres imitant un ver ou une grosse limace– qui est certes en mesure de rapporter des touches toute l’année mais dont je fais ma technique phare du moment pour des raisons réglementaires mais aussi environnementales.
Le réglement
Il faut néanmoins faire attention car tous les départements ne sont pas logés à la même enseigne en termes de réglementation. Avouons même qu’au niveau national, c’est un peu le bazar, puisqu’il n’y a pas consensus entre toutes les fédérations concernant les tolérances techniques en seconde catégorie durant cette période. S’agissant du silure, certaines fédérations départementales, comme celle de l’Aveyron par exemple, offrent une liberté totale sur tout le département ou sur des secteurs définis, comme sur le barrage d’Albi-Rivières, par exemple (voir encadré). D’autres à l’inverse interdisent purement et simplement toute technique usant d’un poisson, mort ou vivant, tous les leurres et toutes formes de maniement. Dans ces départements, la pratique traitée ici ne peut absolument pas être mise en place.
Tarn : du nouveau
Nouveauté mise en place par la fédération départementale du Tarn : sur le barrage de Rivières, les pêches aux leurres artificiels, mort-manié, mort posé et au vif sont autorisées pendant la fermeture du brochet. Cette réglementation se conjugue avec un no-kill immédiat et intégral pour toute espèce capturée, brochet, mais aussi sandre, perche, black-bass et silure.
Et de trois
Enfin, un troisième type de réglementation interdit la pêche avec des poissons (mort ou vif) ou des leurres… mais tolère la pêche maniée aux vers de terre, naturels ou plastiques (mais sans appendice vibratoire), celle que nous abordons ici. Avant de se lancer, il faut donc bien se renseigner auprès de la fédération départementale concernée.
Un peu d'éthique
La période qui va de février à début avril correspond à la reproduction des brochets. Je n’ai personnellement pas d’expérience de capture accidentelle d’un brochet en bordure en pêchant le silure aux worms maniés durant cette période. Mais si tel était le cas, il serait bien entendu nécessaire de stopper tout recours à cette technique sur le parcours. Quelques semaines plus tard, fin avril début-mai donc, ce sont les percidés qui frayent à leur tour non loin des bordures.
S'éloigner un peu
Évidemment, à partir de ce moment-là, les captures accidentelles n’étant pas rares, il est préférable de stopper cette stratégie pour passer sur des pêches en eaux plus profondes, où l’on trouvera les silures sans déranger les sandres, fort occupés désormais sur leurs nids.
Les bonnes conditions
Les conditions météo poussent également à choisir cette stratégie de pêche aux worms maniés. Le mois de mars est généralement pluvieux, avec des ondées régulières, d’intensité modérée à intense sans aller jusqu’à l’orage, le tout sur des sols humides voire imbibés. Les eaux des rivières sont alors gonflées. Pour les silures, les zones peu profondes donnent accès aux calmes qui se réchauffent plus rapidement que les grandes profondeurs sous l’influence des premiers soleils printaniers. Des eaux qui auront en outre lessivé les pâtures et les rives, emportant avec elles petits rongeurs pris au piège dans leurs galeries, quantité de lombrics, vers de rosée et autres limaces. Une aubaine pour les silures… et pour nous autres pêcheurs aussi. N’ayant besoin que de peu de matériel, j’aime ces premières pêches de la saison pour leur simplicité. J’utilise un ensemble assez passe-partout : canne 20-80g (2,70m du bord ou 2,10 à 2,40 m en bateau), d’action plutôt de pointe pour permettre le maniement, et moulinet en taille 4000 garni d’une tresse en 30/100. Dans ma musette, j’emporte une ou deux boîtes avec une poignée de worms de 5 à 10 pouces, aux coloris naturels (brun, vert) et chartreux ou firetiger, plus quelques armements, têtes plombées, lests et c’est tout ! Je ne déteste pas les vrais vers de terre mais, maniés sans cesse, ils sont trop fragiles sur des armements épais destinés au silure.
Les bons postes
Il s’agit là d’une pêche semi-itinérante. Je me déplace en insistant sur les postes offrant des abris au tumulte des veines d’eau principales. Généralement, j’utilise des lests de 10 à 40 g maximum. J’essaye d’obtenir une présentation très planante. C’est pourquoi, je vais m’attarder particulièrement sur tous les contre-courants bien marqués (quai, appontage, péniche en stationnement, sortie de fossé, arrière d’épi ou de palplanches) qui offrent toujours quelques surfaces refuges. Si vous avez du mal à repérer ces zones, lisez les déplacements des particules, de la végétation ou de détritus flottants. Leurs mouvements doivent être significativement plus lents que ceux que vous voyez filer au milieu de la rivière. Ils se déplacent parfois à contre-courant allant et venant dans la même zone sans en sortir, reproduisant toujours le même circuit. Là, vous tenez une zone de premier choix qu’il faut explorer en priorité. La pêche se fait très rarement dans plus de cinq mètres d’eau, parfois dans moins de deux ! N’oubliez jamais qu’un petit mètre d’eau calme et turbide peut abriter un joli poisson.
Des montages simples
Tous les montages types perche et black-bass permettent de ferrailler avec des silures. Il suffit simplement d’adapter les armements. Ensuite, c’est le terrain qui décide et guide les choix. Lorsque j’aborde un poste pour la toute première fois, j’attaque avec un montage très classique: un worm sur tête plombée. En quadrillant le poste, je cherche le contact direct avec le fond permettant, tout en pêchant, de me le représenter mentalement : relief, obstacle, type de substrat, puissance des courants, etc. Si c’est propre et étendu, avec peu de courant (chenal de sortie de port ou d’écluse, canal, grande prairie), j’apprécie particulièrement le Carolina Rig que j’équipe d’une de mes imitations « limaces » (voir encadré). J’anime par tractions lentes, amples et plutôt horizontales, à la canne, pour obtenir de longues phases planées très souples. Sur des secteurs où l’action doit être forcément plus verticale (aplomb de bateau, palplanches, épi, cassure), j’utilise deux types de présentation. Le drop-shot permettant lenteur et insistance, la durée de pêche peut être allongée, le montage étant manié de longs moments avec finesse et précision. À l’inverse, la monture avec plomb-plat va provoquer par sa nage erratique, saccadée et dynamique. Une manière de tenter de déclencher des silures qui seraient présents mais repus ou apathiques.
De l'imagination
Et si ces gros malins ont déjà investi les arbres noyés et fagots de bois morts charriés tout l’hiver, redoublez d’imagination et créez des montages wacky permettant à la fois de passer au travers des bois morts sans encombre et de réaliser quelques animations bien aguichantes.
Un leurre limace
Un leurre imitant une limace, cela n’existe pas réellement à notre connaissance. En revanche, il est très facile d’obtenir des worm limace un peu plus haut et plus plat à partir de slug ou de finesse auxquels on peut retirer tous les appendices vibratoires pour n’en conserver que le corps quasi-cylindrique et très souple, rappelant une bonne grosse limace.