Les sites du groupe Info6TM

Hommage à Marc Sourdot : la pêche de l'ombre en noyée dans le n°117 de Pêche Mouche

Notre ancien collaborateur Marc Sourdot est décédé le 30 octobre dernier à l'âge de 77 ans. Il a été le premier rédacteur en chef non-officiel de Pêche Mouche, qui était au départ un hors-série mouche du magazine La Pêche et les poissons. Pendant quarante ans, il a écrit des articles, en particulier sur la pêche des migrateurs, le corégone ou l'ombre. Voici un article du n°117 de Pêche Mouche, sur la pêche de l'ombre en noyée, publié fin 2016.

Pêche en noyée : où, quand, comment ?

La mouche noyée, cette grande oubliée des pêches à la mouche, fait pourtant le bonheur de ses adeptes, particulièrement quand ils s’adressent aux ombres. Quelques principes de base peuvent aider le débutant à s’y retrouver.

C’est sur les grandes rivières que cette pêche trouve la meilleure illustration de ses possibilités, sur les gravières, les « glissettes » au courant régulier entre deux pools plus profonds.

Où ?

L’Ain, la Sioule, et la Dordogne, entre autres, nous offrent de tels profils propices à notre pratique préférée. Sur des rivières plus modestes on peut, certes, pratiquer en noyée mais il me manque cette impression de « grands espaces » que je trouve inhérente à cette pêche quand, de l’eau jusqu’à la taille, je descends pas à pas un courant, dans l’attente d’une touche qui ne saurait tarder ! Cette façon de faire m’a permis d’aborder de grandes rivières que je ne connaissais pas, de me familiariser avec leurs profils avant, parfois, de changer de tactique et de technique. C’est en noyée que j’ai découvert les ombres du Rhône et ceux de la Vienne avant de les essayer en sèche ou en nymphe. Car cette pêche permet de prospecter systématiquement une grande surface d’eau en un minimum de temps et de pouvoir ainsi localiser les tenues préférées du poisson. Cette pêche est plus une pêche d’intuition que d’observation directe. On n’y a pas les repères des gobages ou des insectes dérivants comme en sèche, ou la vue directe du poisson comme en nymphe. Tout se passe sous l’eau, sans indice visible. C’est peut-être cette part de mystère qui explique en partie la désaffection qui touche cette pratique et, au contraire, ce qui en fait une technique parfaitement adaptée à ces grands courants apparemment uniformes.

Quand ?

Durant toute la saison ai-je envie d’écrire. Et c’est vrai que pour moi la configuration de la rivière compte plus que le moment. Mais à l’ouverture de mai, les ombres ont souvent tendance à sauter sur tout ce qu’on leur présente, tant qu’ils n’ont pas reconstitué leur réserve d’après la fraie! Et c’est encore plus vrai en noyée. Aussi m’arrive-t-il de m’abstenir après deux ou trois prises un peu trop « faciles ». À partir de la fin juin c’est une autre histoire et il faut faire preuve d’un peu plus de sens tactique. Plutôt que de taper l’eau en l’absence de gobages, je trouve préférable de descendre un courant, mètre par mètre, en insistant seulement sur ce qui me semble un poste plus favorable: rupture de vitesse dans la « glissette », léger remous provoqué par un obstacle noyé ou resserrement entre deux rochers, tout ce qui peut provoquer une « irrégularité dans la régularité ». On peut donc pêcher en noyée tout au long de la journée sans se soucier des gobages ou des éclosions. Et pourtant… Pourtant, il m’est souvent arrivé de revenir à la noyée après une série de refus sur des poissons bien installés et pas seulement sur ces grands courants que j’ai évoqués plus haut. Je ne suis pas le seul à en avoir fait l’expérience et je dois ce changement de tactique au grand Aimé Devaux que j’accompagnais sur l’Ain au début des années 80. Un jour où les ombres se montraient réticents à ses « culs de canard » en surface, après plusieurs refus, Mémé m’annonça : « On les aura quand même ! » Et de troquer le CDC contre deux noyées bien déplumées puisées dans son légendaire « farfouillus », boîte à savon qui lui servait de réserve à mouche. Après avoir lancé aval mais un peu à l’écart des gobages observés, il ferra le premier ombre au premier passage, le second au second passage. « Rien d’étonnant à cela, me dit-il ! Les ombres sont beaucoup moins chipoteurs sous l’eau qu’en surface. Rappelle-toi ! » Et je m’en suis souvenu. C’est pourquoi il m’arrive souvent, sur des courants lisses, de passer de sèche en noyée lors de certains coups du soir qui peuvent rendre fous à force de refus.

Comment ?

La pratique de la noyée est d’une grande simplicité. Ce qui ne veut pas dire d’une grande facilité. Tout se passe donc à l’aveugle entre la main qui tient la canne, la canne qui soutient la ligne, la ligne qui dirige les mouches, mouches qui sont censées berner les ombres. Bien que ce poisson ne soit pas très farouche, il reste néanmoins prudent et un ombre dérangé ne sera pas souvent un ombre mordeur. Comme on le pêche aval, face à lui, dans sa coulée de préférence, il est préférable de l’attaquer d’assez loin, entre 8 et 12 mètres, même si vous en voyez certains venir batifoler dans vos pieds. Une plus grande longueur de ligne rendrait l’arraché et le lancer plus laborieux et les risques de décrochages multipliés. C’est donc entre ces deux points que le débutant trouvera sa « distance de pêche », alliant confort et efficacité, et s’y tiendra. Il sentira mieux ainsi évoluer sa ligne, réglera une fois pour toutes la puissance de son lancer et la force nécessaire à l’arrachage de la ligne en fin de coulée, sans avoir recours au moindre faux lancer : c’est là une des caractéristiques de cette pêche. Le lancer, rectiligne mais non tendu, se fait trois quarts aval, l’angle d’attaque, plus ou moins ouvert, permettant une prospection plus ou moins importante. C’est l’expérience qui guidera chacun dans le choix de ce « bon angle d’attaque », compromis entre tension et relâchement de la ligne qui donnera ainsi l’allure la plus « pêchante » à notre train de trois mouches.

Juste équilibre entre tension et relachement

Le lancer effectué, c’est au courant de jouer, de conduire la ligne et les mouches dans une dérive qui se rapproche de celle d’un insecte ou d’une larve emportée par le courant. La main gauche doit rester passive, totalement inactive, pour ne pas contrecarrer la dérive de la ligne par des retenues ou des tractions inutiles, voire néfastes. Pour favoriser cette dérive la pointe de la canne sera dirigée vers l’eau et accompagnera la ligne dans son trajet vers l’aval. En fin de coulée, la main gauche peut reprendre ses droits et, en récupérant une petite longueur de ligne le cas échéant, préparer le lancer suivant. Il faut néanmoins prendre garde que l’ombre attaque parfois en bout de course à l’instant qui précède l’arraché. Mais c’est en cours de dérive, ou parfois au posé, que l’ombre attaque le plus souvent. Si la canne est bien positionnée, pointe vers l’eau, et le moulinet manuel bien réglé, le poisson se pique seul sur le choc de la touche. Certains reprochent à cette pêche les nombreuses « fausses touches » enregistrées, les « tirées sans suite ». Deux raisons principales à cela : la première c’est que la ligne trop tendue, à cause d’un lancer trop rectiligne ou d’une action intempestive de la main gauche, a du mal à être engamée par le poisson. On ressent un arrêt et c’est tout. La seconde raison, au contraire, tient au fait que la ligne est trop « molle », trop détendue. Dans ce cas on perçoit une faible tirée sans suite. Une mauvaise position de la canne tenue trop haute et qui amortit le choc du ferrage peut en être la cause. Mais ce peut être également, surtout sur des courants irréguliers, un ventre de la ligne qui aboutit au même résultat. On comprend dès lors ce que signifie ce juste équilibre entre tension et relâchement et son importance pour cette pêche. Sur des eaux plus calmes, sur des lisses peu rapides par exemple, il en va tout autrement. Mais c’est une autre histoire dont nous parlerons peut-être un autre jour.

Adapter le matériel

Même s’il m’arrive encore d’utiliser une 9 pieds en bambou refendu, je ne le recommande pas au pêcheur débutant. Nos cannes actuelles en fibres synthétiques offrent à longueur égale toutes les possibilités d’action, de la plus raide à la plus Une technique assez simple, ce qui ne veut pas dire d’une grande facilité. souple. Une canne de 9 ou 10 pieds d’action plutôt douce, me semble tout à fait adaptée à cette pêche. Une ligne intermédiaire ou à pointe plongeante pour les eaux encore froides fera l’affaire, même si en été les ombres viennent prendre dans la couche supérieure. Auquel cas une flottante munie d’un corps de bas de ligne plongeant fera l’affaire. Ce corps de bas de ligne sera terminé par une pointe de 1,80 m de 18 centièmes munie de deux courtes potences. Cela paraîtra bien grossier à certains, mais il faut rappeler qu’en noyée on utilise des modèles plus gros qu’en sèche ou en nymphe. En pointe une mouche un peu lestée sur hameçon 12 n’a rien de rédhibitoire, un 14 en intermédiaire et en sauteuse compléteront l’ensemble. Du coup un 18 centième n’a plus rien de repoussant! Le choix de ces modèles n’a rien à voir avec le casse-tête des mouches sèches. L’essentiel réside dans l’équilibre de l’ensemble: la plus lourde en pointe, une à peine ou pas lestée en intermédiaire, une très légère en sauteuse. Je commence souvent, par exemple, avec un ver d’eau de type « Bibi » en pointe ou une « faisan et orange », une intermédiaire en montage « espagnol » hackles couchés vers l’arrière, et une sauteuse en plumes molles de perdrix ou, carrément, une « Peute » si chère à Bresson. Cela peut paraître sommaire mais cette pratique s’accommode d’un inventaire réduit de modèles. Elle s’accommode mal, en revanche, des erreurs de la gestuelle. Des gestes simples, on l'a vu, mais qui ne supportent pas là peu près.

"Pour recevoir chaque semaine toutes les actus de la pêche, nos concours, nos bons plans, nos sorties vidéos, nos articles gratuits et bien plus encore... inscrivez-vous vite à notre Newsletter !"

Je m’inscris à la newsletter

Débuter la pêche à la mouche

Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15