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Le permit : le Graal du moucheur sur les flats

Crédit photo Herlé Hamon
Après le bonefish, abordons le mythique permit. L’espèce est considérée comme la plus difficile à prendre au fouet ce qui contribue grandement à sa réputation. Il fait partie avec le tarpon, le bonefish et le snook du « Inshore grand Slam » qui consiste à prendre trois de ces poissons le même jour, le permit étant la pierre angulaire de cet exploit. Une fois capturé, on peut considérer que le chemin vers le « Grand Slam » est grand ouvert. Gros plan donc sur le poisson qui rend fou certains pêcheurs, folie qui m’a poursuivi durant de longues années…

Sa méfiance légendaire trouve une partie de son fondement dans le fait qu’il s’agit d’un poisson vivant souvent entre 10 et 50 mètres de fond et qui quitte la sécurité des profondeurs du récif pour rechercher sa pitance dans 80 cm d’eau voire moins. Le permit est une espèce de carangue mais qui a donc la particularité de se nourrir principalement de crabes et de crevettes sur les hauts-fonds. Il n’a pas du coup l’agressivité de ses cousines les Ignobilis ou Hippos qui, elles chassent principalement d’autres poissons. Notre « palometa » (nom du permit en Espagnol) prend donc tout son temps pour scanner le fond des flats et, par la même occasion, notre mouche ! Il a cependant l’incroyable puissance et la vitesse caractérisant tous les carangidés. Son apparente nonchalance, lorsqu’il se balade à la recherche de sa pitance, se transforme vite en rage incontrôlable une fois piqué ! Il ne faut pas oublier que l’on ne peut pas le pêcher avec un bas de ligne de 100 lb comme pour la GT par exemple, vingt livres étant souvent considérées comme un maximum. Pas question donc de trop brider sous peine de se faire casser au premier rush. Il n’est donc pas facile de prendre un de ces mangeurs de crabes vous l’avez compris ! Tout cela fait que nous ne sommes pas au départ pêcheur de permit mais qu’on le devient. Ce que je veux dire ici c’est qu’il s’agit d’un cheminement qui se fait, petit à petit, jusqu’au rite de passage que représente la première capture qui est souvent une véritable libération. Même s’il n’y a pas de règle absolue car j’ai vu au fil des années des pêcheurs prendre un permit sur un premier lancer qui n’était même pas bon comme d’autres poser parfaitement leurs mouches des dizaines de fois sans aucun résultat…

Certaines destinations ont ce que l’on appelle des « trous bleus ». Ce sont des dépressions dans les flats qui, parfois, forment des galeries souterraines immergées de plusieurs kilomètres qui communiquent entre elles, comme ici au sud des Bahamas. Les permits aiment particulièrement ces lieux qui concentrent souvent la nourriture.
Crédit photo : Herlé Hamon

Coup de pression

Pourquoi me direz-vous ? Eh bien simplement parce que la réputation de ce poisson le précède et fait perdre leurs moyens à la plupart des gens qui veulent vraiment en attraper un. Moi le premier j’ai subi cette pression négative qui fait ferrer trop tôt ou trop tard, lancer trop court et combattre mollement jusqu’à décrocher son poisson. En gros pêcher « petits bras » ! Tellement de choses ont été dites et écrites sur le permit qu’il a pris une dimension mystique. Outre atlantique des moucheurs consacrent tout leur temps libre à sa traque. J’en ai rencontré qui ne pêchaient plus que cela et qui en une vingtaine de voyages n’en avait toujours pas capturé… ! Pourtant, il ne s’agit que d’un poisson, méfiant certes, mais pas forcément plus qu’une grosse truite sauvage par exemple. Il ne faut pas oublier qu’au large de la Floride notamment des charters à la journée proposent de prendre des permits au crabe vivant par 15 m d’eau sur des épaves et en font des caisses pleines ! Il faut donc déjà relativiser pour ne pas dire rationaliser sa pêche. Je suis bien placé pour vous en parler car je pense avoir piqué et perdu une dizaine de palometas avant de serrer le premier dans mes bras. J’ai fait à mes débuts de « permit addict » deux voyages aux Mexique où je n’ai pêché que ça et où j’ai essuyé deux belles bredouilles. C’est au Bélize il y a bien longtemps maintenant que j’ai enfin passé un palier grâce à un super guide en retraite maintenant : Julian Cabral. Il m’a simplement dit : « you spook or you hook » que je pourrai traduire par « tu effraies ou tu captures ». Cette petite phrase anodine est sans doute le meilleur conseil que l’on puisse donner à un pêcheur de permit. En effet, quand une palometa est en tailing sur un flat la différence entre un bon lancer qui va permettre au poisson de repérer la mouche et de l’avaler de celui qui va lui tomber sur la tête et le faire fuir est infime ! Notre imitation doit alors tomber à quelques centimètres de sa tête et se poser juste devant sa bouche ! Le permit a alors un cone de vision particulièrement réduit et ne verra certainement pas notre streamer s’il se trouve à plus de cinquante centimètres de lui.

Gros plan sur une imitation très eficace, le Dean Perez Velcro Crab, un crabe en longueur ayant aujourd’hui une très bonne réputation dans le « milieu » des pêcheurs de permits.
Crédit photo : Herlé Hamon

Une pêche visuelle et non tactile

Le permit a la faculté d’aspirer notre mouche et de la recracher dans un temps record. Bien souvent lorsque l’on sent une tirée dans la soie cela signifie que notre palometa s’est piquée toute seule en crachant notre streamer. Le plus souvent le poisson se décroche dans les premières minutes de combat voire lors du premier rush. À l’instar de la traque des grosses truites à vue, il faut donc anticiper, sentir le moment où le permit avale l’artificielle, et c’est là que réside toute la difficulté. Sur ce point, rien ne vaut l’expérience et c’est au fil des rencontres sur les flats et des échecs que l’on comprend ou que l’on sent ce moment. On ne devient pas champion de pêche en nymphe à vue en une semaine, c’est en observant le comportement des truites que l’on apprend. La recherche des carpes à la mouche à vue, bien que beaucoup moins exotique, demeure un bon entraînement pour les tropiques. Ce poisson aspire les mouches qu’on lui présente posées sur le fond. Il n’est pas si facile à ferrer et se bat bien. Reste que peu de plans d’eau ou de rivières se prêtent à cette pratique. Bien souvent, une forte population de ce cyprinidé rime avec une eau turbide. Il est donc primordial de bien choisir son voyage lorsque l’on veut vraiment se frotter au roi permit. Mon premier conseil est de ne pas consacrer trop de temps à l’espèce sur un premier, voire sur « les premiers » séjours que vous ferez sur les flats. Le bonefish étant un poisson « école » beaucoup plus facile à rencontrer et à prendre, il faut se concentrer sur lui au départ. Sur la plupart des séjours sur les flats vous aurez la chance de voir des permits de façon sporadique, souvent à 2 ou 3 reprises dans la semaine, ce qui est peu pour engranger de l’expérience et le pêcher sereinement. Il faut ensuite choisir une destination spécifique. À ce petit jeu, Belize arrive en tête je pense, surtout le sud du pays avec ses hauts-fonds en pleine mer qui abritent une excellente population de palometas et de très bons guides qui se consacrent quasi exclusivement à ce poisson et sa traque à pied sur les flats.

Lorsque l'on pique un beau permit en wading, il faut avoir un moulinet contenant au minimum 200 mètres de backing pour arrêter un premier rush qui semble parfois interminable
Crédit photo : Herlé Hamon

En wading

Cette pêche en wading est de loin la plus belle, car elle s’apparente vraiment à une chasse où l’approche devient primordiale. On repère les permits en tailing. Cette queue en V, immense et noire, qui perce la surface est toujours un grand moment d’excitation. C’est alors qu’il faut garder son sang-froid et tenter le meilleur lancer possible ! La soie est tendue dans le prolongement du scion de la canne qui se trouve au ras de l’eau, voire dessous s’il y a trop de vent. L’imitation de crabe ou crevette doit couler librement. Une fois sur le fond, il faut faire un premier petit strip qui décolle la mouche et doit alerter le permit. Ne quittez surtout pas le bout de sa caudale des yeux, s’il disparaît et resurgit à peu près sur votre artificielle, ferrez immédiatement ! Voilà pour la théorie. Facile à écrire, un peu moins à faire en action. En bateau, vous devez utiliser des mouches plus lestées et vous aurez souvent à faire à des poissons qui se déplacent dans un à deux mètres d’eau. Ici, l’action de pêche consiste à intercepter les permits en anticipant leur trajectoire. Idéalement, le crabe doit se trouver sur le fond avant qu’ils n’arrivent et de petits strips doivent attirer leur attention. Bien souvent, un ou plusieurs poissons suivent notre imitation parfois jusqu’au bout de la canne ! Il faut donc ne pas commettre l’erreur de stripper sans interruption. Il est important d’arrêter de ramener et attendre que l’artificielle redescende se poser sur le flat. Normalement, c’est à ce moment que les palometas passent à table. Cela va très vite, l’une d’entre elle se fige et vous devez tirer énergiquement sur la soie. Comme une grosse truite se saisit d’une nymphe, il est important de repérer la fraction de seconde où le poisson stoppe pour aspirer la mouche. Très souvent nous n’avons pas le temps de réagir et les permits s’éloignent aussi vite qu’ils étaient apparus. On peut alors penser, qu’encore une fois ils n’ont pas mordu, que notre imitation de crustacés n’est pas la bonne, que c’est trop difficile, trop aléatoire, mais non !

Les imitations de crabes sont une base pour le permit.
Crédit photo : Herlé Hamon

Pas de formule magique

C’est simplement que nous sommes encore passés à côté ! Un permit qui suit une artificielle le fait pour la croquer, il ne gaspille pas son énergie pour rien. Il faut juste trouver ce qui l’empêche de mordre et, bien souvent, il s’agit d’une animation trop rapide. Il n’y a guère que sur les bancs de petites palometas de 1 à 3 kg qu’une récupération style « bonefish » est efficace. Dans ce cas, plutôt qu’un crabe, privilégiez une imitation de grosse crevette dite « Mantis Shrimp ». Un modèle s’est taillé une solide réputation, il s’agit de l’Avalon Fly créé pour les flats de Cuba et surtout de Cayo Largo. Cette mouche fonctionne bien sur les fonds sablonneux et vaseux qui abritent de nombreuses crevettes. Elle n’est en revanche pas très efficace au Bélize ou aux Bahamas où je l’ai essayée avec peu de suivis. Il n’y a, de toute façon, pas de règle immuable ou de formule magique. Le permit est fantasque et la première chose est de s’adapter au comportement de celui qui se trouve face à vous. La meilleure opportunité que vous pouvez rencontrer est lorsqu’une ou plusieurs palometas suivent une grande raie pastenague. Cela arrive assez souvent sur certaines destinations, comme à Cayo largo justement, ou encore à Acklins aux Bahamas. Les grands poissons plats sont les alliées des permits mais aussi des pêcheurs ! En fouillant le fond, les raies font s’enfuir crevettes et crabes ce qui décuple l’agressivité du ou des poissons pilotes qui doivent se jeter sur les proies qui tentent de s’éloigner. Ils sont donc plus opportunistes et généralement un peu plus faciles à prendre ! La technique consiste ici à lancer son imitation au plus près de la raie, voire directement dessus et de la laisser couler un peu avant de l’animer. En général, si le permit voit la mouche il la poursuit et l’avale. Il faut rester tendu et faire de micros strips permettant de garder le contact jusqu’à ce que la soie se tende un peu pour ensuite ferrer énergiquement, toujours avec la ligne, la canne pointée vers le poisson.

Remise à l’eau d’un permit indopacifique sur un flat australien
Crédit photo : Herlé Hamon

Maîtriser la dérive du bateau

En bateau, il est un peu plus facile de lancer car l’on se trouve surélevé par rapport à la surface mais, bien souvent, le vent fait dériver l’embarcation et il faut savoir compenser cela sous peine d’être incapable de piquer le permit qui prend notre crabe. Il faut alors stripper juste pour essayer de rester le plus tendu possible, cela n’est pas facile et je dois quelques beaux décrochés à ces dérives que les guides ne peuvent pas toujours contrôler depuis leurs plateformes. Ce qui est bien avec cette quête c’est que, malgré les échecs, parfois on se crée des souvenirs pour la vie et on s’améliore techniquement tant cette pêche est exigeante. J’ai vécu mes plus belles montées d’adrénaline halieutiques à courir derrière ce satané poisson. J’avoue qu’aujourd’hui, après quelques dizaines de captures, je me suis calmé ! La genèse de ma « palomite aigue » remonte à un séjour à los Roques, au Venezuela, il y a environ vingt ans, où j’avais piqué et cassé ma première palometa… J’étais ferré, piqué, hypnotisé pour longtemps par la magie de cette rencontre et de cette espèce. Je ne consacre plus l’intégralité d’un voyage à essayer de prendre un ou plusieurs permits mais quelques jours de temps en temps… Je pense d’ailleurs que mon rendement poissons pris/jours de pêche est nettement meilleur maintenant et cela me laisse du temps pour m’amuser sur les bonefish, barracudas, tarpons, carangues, triggers et autres supers adversaires tropicaux ! Vous l’avez compris, la prise d’un permit est un réel accomplissement mais il faut savoir rester zen pour en profiter pleinement et ne pas oublier qu’un voyage de pêche ne se limite pas à la prise d’un poisson, même « le plus dur à prendre à la mouche »

L’auteur nous présente le permit de l’Indopacifique, le blochii qui est un peu plus jaune que celui de l’Atlantique et il faut le dire un peu plus facile à prendre aussi.
Crédit photo : Herlé Hamon

 

Le matériel pour le permit

Le plus important, comme d’habitude, est d’avoir une bonne canne adaptée à cette pêche. Une 9 pieds pour soie de 10 est, je pense, ce qu’il y a de mieux pour lancer dans le vent une imitation de crabe relativement lourde et peu aérodynamique! Toutes les grandes marques proposent de très bons modèles de 9 pieds soie de 10 en 4 brins. Je pêche pour ma part avec des Thomas and Thomas Sextant et Exocett très légères et puissantes à la fois, les marques Sage, Winston, Echo ou TFO proposent également de bonnes cannes… Le moulinet doit être très fiable, et posséder un très bon frein progressif qui ne va pas s’emballer lors du premier rush et avoir une bonne capacité. Je pense que 250 mètres de backing 30 lbs minimum est raisonnable. Vous pouvez également utiliser de la tresse en 60 lbs pour assurer le coup, c’est cette solution que j’ai retenue! Les marques Abel, Bauer, Hatch, Nautilus, Wade… sont excellentes pour l’eau salée. La soie la plus utilisée est une flottante en WF bien décentrée vers l’avant. J’utilise des Scientific Angler de type « Grand Slam » ou « Sonar » spéciale eau chaude, ne l’oubliez pas. Du côté du bas de ligne, je pense qu’une fois et demie la longueur de la canne est un bon compromis entre discrétion et facilité de lancer. Les bas de ligne queue-de-rat sans nœud de Scientific Angler de 9 à 10 pieds et finissant en 20 lbs, sont bien adaptés. La pointe sera en 16 à 20 lbs dans des conditions normales, je ne vous conseille en tout cas pas de descendre sous les 15 lbs. Ce poisson est suffisamment difficile à leurrer pour ne pas le casser lors du combat. Je ne pense pas que le diamètre du fil, si l’on reste raisonnable et que l'on ne pêche pas les palometas du syndicat d’initiative, soit un facteur important de capture.

Reste à faire un point rapide sur les mouches

Il vous faut des imitations de crabe et un ou deux modèles de crevettes type « Mantis Shrimp » une Puglisi et une Avalon Fly par exemple. Les variantes de Del Merkins, les Turneffe crabs, Bauer Crabs, et autres Tchernobyl Crab peuvent encore tous fonctionner. D’autres modèles plus récents, comme les Flexo Crab, Dean Perez Velcro Crab ou Streamer Art Design crab, sont très efficaces. J’ai la chance d’utiliser souvent des mouches montées par mon ami Franck Ripault qui sont de véritables petites œuvres d’art mais qui ne sont pas commercialisées malheureusement…

 

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